jeudi 24 mars 2022

Le transport combiné, une opportunité à concrétiser pour améliorer l’empreinte carbone des transports de marchandises

Le transport combiné fait l’objet d’un regain d’intérêt. Plus écologique, il répondrait aux défis du transport de demain. Découvrez dans cette note quelques pistes de réflexion pour l’amélioration de l’attractivité du transport combiné.
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Le transport combiné, mode de transport de marchandises qui allie modes routiers, ferroviaires ou fluviaux, fait l’objet d’un regain d’intérêt, aussi bien des entreprises de transport, que des gestionnaires d’infrastructures et des pouvoirs publics. L’intermodalité permet d’optimiser la sobriété énergétique des solutions logistiques tout en apportant des réponses alternatives au « tout routier ». Plus écologique, il répond déjà aux défis du transport de demain.

En France, la part du transport combiné ne représente qu’environ 25 % du transport ferroviaire de marchandises, soit environ 2,5 %[1] du transport de marchandises tous modes confondus. Cette note présente des pistes de réflexion pour l’amélioration de l’attractivité du transport combiné.

Le transport combiné à la croisée des chemins

Les raisons d’un regain d’intérêt

La décarbonation est aujourd’hui l’objectif de développement durable le plus important pour le gouvernement, en vue d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Elle correspond à l'ensemble des mesures permettant la réduction des émissions de dioxyde de carbone (CO2) d'une entreprise, d'un secteur d'activité ou d'un pays.

Concernant le transport de marchandise, l’impact sur l’environnement est très différent selon le mode d’acheminement.

Comparaison des émissions de CO2 en grammes pour transporter une tonne de marchandise sur un kilomètre : 

Fig. 2 Federal Environment Agency : TREMOD 5.63 (2016)

On constate par ailleurs que les émissions de Gaz à Effets de Serre (GES) des transports sont, en France, très liées aux modes routiers :

Fig. 1 Répartition des émissions de GES en France pour le secteur des Transports – 2018, CITEPA

Limiter le nombre de poids lourds sur les routes françaises, en recourant plus massivement au transport combiné, réduirait mécaniquement les émissions de GES dues aux transports de fret. Le transport combiné participe également à atténuer la saturation des routes, en diminuant le nombre de camions sur les grands axes, réduisant également la consommation moyenne d’un trajet en voiture en permettant une conduite plus fluide, coup double donc. La désaffection des jeunes actifs pour le secteur du transport routier, la diminution du nombre de chauffeurs routiers, sont autant d’opportunités pour le transport combiné : en étant positionné sur les parcours longue distance (supérieur à 500 km), il est clairement complémentaire d’un transport routier concentré sur le pré et post acheminement tout en ayant recours au routier pour le dernier kilomètre.

Ainsi, en septembre 2021, l’État Français a décidé un plan de soutien au fret ferroviaire de 170M€ par an[1] jusqu’en 2024, dont 47M€ destinées aux entreprises de transport combiné pour favoriser la mise en place de services compétitifs contribuant aux objectifs de la transition écologique.

Par ailleurs beaucoup des propositions du plan d’investissement pour le fret ferroviaire proviennent des opérateurs de transport. En effet, leur implication au sein de l’initiative 4F (Frêt Ferroviaire Français du Futur), alliance inédite qui réunit tous les acteurs de la filière pour proposer une ambition forte aux pouvoirs publics : doubler la part des marchandises transportées par le rail en France d’ici 2030.

De plus, la France dispose d’un réseau ferroviaire étendu, et de ports stratégiques (Le Havre, Marseille, Calais...) dont certains disposent déjà de terminaux de transport combiné.

Aujourd’hui, 150 entreprises de transport utilisent régulièrement le transport combiné, contre un potentiel de 5 000[2] pouvant être intéressées : la marge de progression reste importante.

Défis à relever

Bien que présentant de nombreuses opportunités, le développement du transport combiné nécessite la levée de plusieurs obstacles.

  • Lourdeur des investissements requis

Les barrières à l’entrées de nouveaux acteurs demeurent élevées pour le transport combiné. Des investissements en matériels importants, une expertise peu répandue, un besoin en organisation fort… sont autant d’éléments pouvant compliquer le démarrage de ce type d’activité.

  • Exigences de qualité de service pour répondre aux attentes clients

Il existe des difficultés en termes de qualité de service pour des flux logistiques très tendus, avec un niveau d’exigences important (fréquence des acheminements, temps de transport, plages horaires, suivi et information des envois...), qui fait que la demande en transport se tourne souvent vers des solutions plus souples et moins couteuses, comme le transport routier.

Enfin, la lente uniformisation des systèmes ferroviaires européens (signalisation, alimentation électrique…) est une difficulté structurelle ralentissant l’adhésion au transport combiné.

Revoir l’organisation et le financement pour accompagner le transport combiné

Parmi les pistes pour répondre aux nouveaux enjeux du transport, le transport combiné doit être le plus écologique possible, tout en améliorant sa fiabilité et en simplifiant son usage. Une adaptation de son modèle opérationnel aux demandes de réactivité actuelles s’avère indispensable.

  • L’innovation comme vecteur principal de croissance

La croissance du transport combiné sera encouragée par l’innovation technologique et digitale, mais également par l’innovation organisationnelle, notamment de son système d’informations, pour s’adapter aux besoins actuels et futurs.

De nouvelles technologies sont en cours de déploiement pour diminuer encore l’impact des trains sur l’environnement, comme les trains à hydrogène, avec une première mise en circulation commerciale prévue fin 2025 chez TER. L’emploi du biogaz ou du gaz naturel sont également des moyens de diminuer l’impact environnemental du pré et post acheminement, ou des barges maritimes.

La digitalisation des opérations ferroviaires, et l’automatisation des terminaux de transport combiné permettent aussi de renforcer l’efficacité industrielle du secteur et de fluidifier le bout-en-bout.

Pour l’innovation digitale, le développement d’une plateforme web associant des données fiables (horaires des terminaux, itinéraires, tarifs, complémentarité des modes de transports...) et services à valeur ajoutée (calculatrice carbone, facilités douanières…) permettrait d’améliorer l’attractivité du transport multimodal. En valorisant et en centralisant les informations utiles à un parcours « d’entrepôt à entrepôt », une telle plateforme serait à même d’améliorer considérablement la fiabilité du transport combiné. La mise à disposition et la simplification d’accès à ces données permettra à l’ensemble des acteurs de la chaîne de transport d’optimiser leurs opérations et donc de permettre un acheminement bout-en-bout des marchandises plus fiable, et écologique.

  • Affuter le modèle du transport combiné
Le transport combiné ne peut être en concurrence directe avec le transport routier : il doit le compléter et participer à son évolution.

Le transport combiné doit se rapprocher de l’efficacité du modèle routier, en étendant par exemple l’amplitude horaire des terminaux. De plus, la fiabilisation de la circulation est impérative pour l’attractivité du transport combiné : cela passe par lesrègles de priorisation de trafic fret et passagers et des travaux de maintenance, et à la réduction des causes de retard liées aux infrastructures.

La révision de ces règles et les investissements dans les infrastructures nécessitent un choix sociétal.

  • Trouver des investissements complémentaires

L’atteinte des objectifs de croissance nécessite un soutien financier à l’activité important, et un renouvellement des infrastructures de transport.

La qualité et l’efficacité d’un système intermodal reposent sur les trois piliers suivants :

  • les terminaux ;
  • l’efficacité des réseaux ;
  • les besoins du marché.

L’absence ou le manque de performance de l’un de ces 3 facteurs condamne à terme l’ensemble, et les deux premiers piliers ont des besoins en investissements importants en France.

Pour remplir ces défis de développement, de nouveaux terminaux de transport combiné, à proximité des centres industriels, logistiques et portuaires, sont à construire pour couvrir la majorité du territoire.

Fig.3 Terminaux multimodaux en France – 2020, Ministère chargé des transports

Ces investissements serviront aussi au développement de terminaux fluviaux pour assurer un lien efficace avec le transport fluvial et les milliers de kilomètre de canaux.

Une modernisation et un agrandissement des terminaux de transports combinés existants, en fonction de leurs potentiels, sont tout aussi importants pour rester compétitifs.

L’expansion d’un réseau ferroviaire acceptant le gabarit P400, principal gabarit des semi-remorques, est aussi un critère de compétitivité du transport intermodal.

Enfin, des investissements complémentaires sont à trouver malgré l’engagement de l’état pour assurer le développement de nouvelles plateformes. Par exemple, la pérennisation de la subvention de « l’aide à la pince » du transport combiné routier/non routier est essentielle. Les dernières décisions gouvernementales vont en ce sens, avec entre autres la prise en charge à hauteur de 50% des péages ferroviaires pour les opérateurs jusqu’à 2024.

Bien que de nombreux défis persistent, le transport combiné bénéficie d’un rare alignement des planètes qui lui permettra de participer pleinement à l’optimisation du transport de marchandises en participant à la performance environnementale.

 

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