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mardi 1 juillet 2025

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Chain reaction

Depuis une quinzaine d’années, la blockchain trace son sillon dans l’économie numérique. En voie d’émancipation de la sphère crypto, elle pourrait bientôt atteindre un nouveau point de bascule et transformer nos façons d’échanger et de faire société.
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Un registre numérique distribué

La blockchain est une technologie décentralisée de stockage et de transmission d’informations, qui s’apparente à un registre numérique partagé entre les participants du réseau.

 

Chaque « bloc » contient des données (transactions, contrats, etc.) validées collectivement selon un mécanisme de consensus, puis reliées aux blocs précédents pour former une chaîne infalsifiable. 

 

L’ambition est claire : éliminer les tiers de confiance traditionnels (banques, institutions, plateformes) au profit d’un protocole sécurisé, transparent et automatisé. 

 

Grâce à la cryptographie (ensemble de techniques, dont le chiffrement, pour protéger les informations), les données inscrites dans la blockchain deviennent immuables : toute modification est détectée et horodatée, garantissant intégrité et traçabilité. 

 

Des programmes autonomes appelés « smart contracts » permettent d’exécuter automatiquement des actions dès que les conditions sont remplies. 

Au-delà du Bitcoin

Comme toute technologie à potentiel disruptif, la blockchain a connu des débuts chaotiques, liés à ses premières applications dans l’univers de la finance : explosion spéculative autour du Bitcoin, bulles liées aux levées de fonds en cryptomonnaies… 

 

Mais derrière ces turbulences, un mouvement plus profond est à l’œuvre. De nombreux secteurs explorent déjà des usages concrets qui sont autant de potentielles ruptures véritables : 

  • prêts et échanges sans banque dans la finance décentralisée,

  • traçabilité des chaînes logistiques (lire l’exemple ci-dessous), 

  • diplômes, titres de propriété et documents d’identité inscrits sur la blockchain,

  • valorisation d’œuvres d’art grâce à des certificats numériques. 

 

Chaque usage esquisse un modèle où la confiance repose sur la technologie, non plus sur les institutions. 

Une révolution en devenir

L’adoption massive de la blockchain reste aujourd’hui freinée par plusieurs obstacles. D’abord, sa complexité technique : certaines notions et le fonctionnement de cette technologie restent obscurs pour le grand public, tandis que les interfaces manquent encore de simplicité. Une interopérabilité limitée et une consommation énergétique élevée freinent aussi le passage à l’échelle des projets. 

 

En outre, le cadre juridique, encore flou, ralentit les investissements et la participation des institutions. Enfin, les résistances humaines et organisationnelles sont fortes : la blockchain remet en cause des modèles anciens basés sur l’intermédiation et impose un changement culturel profond. 

 

Dépasser ces freins nécessite une éducation à tous les niveaux (citoyens, entreprises, administrations), une réglementation claire et des innovations techniques rendant la technologie plus sobre et accessible. 

 

Il faut aussi construire des passerelles entre acteurs traditionnels et innovateurs, pour faire de la blockchain un outil de transformation progressive, plutôt qu’un choc de rupture. 

 

Si ces défis sont relevés, l’impact de la blockchain pourrait être immense. Elle pourrait contribuer à un rééquilibrage du pouvoir économique et politique, et ouvrir la voie à une organisation sociale plus distribuée. 

 

D’ores et déjà, de nouveaux modèles émergent, comme les organisations autonomes décentralisées, des structures collectivement gérées via une blockchain. 

Un exemple concret : la blockchain alimentaire chez Carrefour

Depuis 2018, Carrefour utilise la blockchain pour garantir aux consommateurs une transparence totale sur l’origine et les conditions de production de certains produits. Chaque acteur de la chaîne (producteurs, transformateurs, distributeurs) enregistre des informations sécurisées et infalsifiables, accessibles via un QR code présent sur l’emballage. Le premier produit concerné fut le poulet d’Auvergne de la Filière Qualité Carrefour. Quand la technologie est mise au service d’une plus grande transparence des produits et d’une plus grande sécurité alimentaire, on peut parler d’impact positif pour toute une filière, du producteur au consommateur final. 

Et si la confiance ne passait plus par les banques, les États ou les institutions, mais par le code ? 

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